Petit moment de détente printanier avec le PSG. Oui, tout à fait. Détente. PSG. Avec en prime : Hatem Ben Arfa nouveau Zinedine Zidane. Et pour une fois : un Zlatan Ibrahimovic plus que discret.
Surfant sur l’omniprésence médiatique du Suédois et du club de la capitale, Arnaud Ramsay (journaliste anciennement à France-Soir et France Football, mais aussi biographe officiel de Bixente Lizarazu, de Nicolas Anelka dont il a toujours les exclus, et moins officiel de Laurent Blanc) et l’illustrateur Philippe Bercovici ont réalisé une BD d’enquête : « Paris vaut bien un cheikh », parue aux éditions 12Bis, connues pour leurs enquêtes investiguées et dessinées.
Disons le de suite : sur un plan graphique, et malgré la qualité des
caricatures, le livre est très quelconque. Mais le propos est ailleurs :
éclairer la façon avec laquelle Doha utilise le ballon rond comme
« arme de dissuasion massive, comme lobby d’influence, comme levier
politique et économique ». Pour s’incruster dans le football et se
servir de la France « comme plate-forme d’influence », le PSG « est l’un
des joujoux extra de la famille royale » de ce micro-Etat richissime
bien que né en 1971 (propos extraits de l’avant-propos du livre). Cet
album entend « revisiter avec humour et sérieux le coulisses du
football », « explorer le marché souterrain de ce sport ».
Pour mieux focaliser, les auteurs se sont mis en légère anticipation. Nous sommes le 13 juillet 2014. Seize ans et un jour après le triomphe des Bleus à Paris, l’équipe de France est emmenée par la « génération 1987″ (Benzema, Ben Arfa), bat à nouveau le Brésil par 3 à 0, et gagne la coupe du monde à Rio. Le héros ? Ben Arfa. Le sélectionneur ? Didier Deschamps, toujours. Celui-là) même qui ne s’entendait pas avec le joueur, lors de leur période marseillaise.
Un an avant, le joueur a signé au PSG, champion de France, qui dans le même recrutait Arsène Wenger pour remplacer Ancelotti. Le tout, pour conserver le titre, et battre le Real de Mourinho (si, si) en Champions League. Laissons le soin au lecteur de lire le fil des résultats de la saison. Un an avant, Ben Arfa s’était acoquiné avec la famille royale de Doha, dont il deviendra de plus en plus l’obligé (mariage forcé, chantage au changement de nationalité).
Le fil rouge se nomme donc Ben Arfa, star inattendue d’une bande dessinée qui, suivant les pressions sur lui exercées par Doha, montre les coulisses –un peu- du foot bling-bling (les virées en club, les filles, les joueurs de plus en plus conseillés mais de plus en plus seuls) et les pratiques –surtout- du foot tel que pratiqué par les nouveaux investisseurs tout puissants : pression sur Platini pour modifier le règlement, relations avec les agents, la dette de Doha envers Sarkozy (notamment sur les exonérations d’impôts sur plus-values immobilières effectuées en France), accord d’Arnaud Montebourg sur le plan qatari pour les banlieues.
Défaut : celui qui suit l’actualité économique n’apprendra rien. De même pour celui pour qui l’actualité sportive est une drogue : Hatem Ben Arfa au PSG, c’est une confirmation des rumeurs persistantes selon lesquelles les Qatariens désirent que des Maghrébins intègrent l’effectif parisien.
Qualité : une pédagogie certaine, permise aussi par l’anticipation, qui éclaire faits et chiffres sans jamais alourdir le trait. On reconnaîtra ici les figures de la télé sportive : Lizarazu, Ménès, Dugarry. Les agents (Bernès), les boss (Leonardo) comme tous les joueurs (Ibrahimovic, Ribéry, etc.
Par-dessus tout, le talent du duo Ramsay/Bercovici est d’avoir rendu un PSG beaucoup moins lourd que son omniprésence médiatique actuelle : ici, pas de Beckham. Ici, « Zlatan » est des plus discrets, pour mes besoins d’un scénario à charge où il se fait voler la vedette par Ben Arfa, dont on revisite au passage la jeune carrière sportive et extra-sportive, de la banlieue à Abd-al-Malik. C’est ici la grande qualité du scénario, qui laisse toute la place à l’information et la pédagogie, ainsi qu’à la perspective imaginée.
Une BD qui, certes, n’intéressera que les passionnés de ballon rond et les amoureux de Paris (ce qui fait déjà beaucoup). Mas un livre dont chaque fait et perspectives sont informés, prouvés –on sait le sérieux de Ramsay.
Paris vaut bien un cheikh, 12 bis, 56 p, 12 euros
Enquête et scénario : Arnaud Ramsay – Dessin : Philippe Bercovici – Couleur : Bonaventure
A noter : les auteurs seront ce jeudi 18 avril, à 19 heures, en dédicace dans une fort agréable librairie indépendante L’Ecailler (101 rue du Théâtre, Paris XVe).
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